[Newsletter 183] Et si la formation s’inspirait de Netflix ?
Publié le : lun 29 avril 2019Views: 3043
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Il y a quelques années bon nombre de sociétés se sont autoproclamées le « Uber » de quelque chose. C’est maintenant au tour de Netflix d’être le nouveau modèle à la mode qui fait tourner les têtes, et un grand nombre d’acteurs de la formation rêvent d’en devenir le « Netflix ». Au-delà de l’effet de mode, Netflix n’a-t-il pas quelques bonnes recettes à nous apprendre ?

 

Le Netflix des plateformes

Netflix n’est plus une startup depuis longtemps, et son succès indéniable d’aujourd’hui cache les difficultés d’hier. Une des clés du succès de Netflix tient dans sa capacité à adapter son modèle en permanence. Les œuvres cinématographiques autrefois commercialisées sur DVD (le premier modèle de Netflix) se sont numérisées, Netflix s’est adapté en se lançant dans la diffusion en streaming avant tout le monde. Les films qui attiraient les foules se sont fait déborder par les séries télé, à nouveau Netflix s’y est lancé à fond, en signant des accords, et en finançant le tournage de nouvelles séries exclusives.

Les plateformes pourraient s’inspirer de Netflix, en ne se focalisant plus quasi exclusivement sur les modules e-learning, mais en s’ouvrant réellement aux parcours mixtes, ou en proposant nativement des flux de contenus à la demande (voie que Edcast ou Degreed cherchent à explorer).

Netflix s’impose aussi par une fiabilité à toute épreuve, fruit non pas du développement d’une technologie spécifique, mais de la maîtrise de la meilleure combinaison possible de technologies existantes, et également par les accords passés avec les opérateurs internet du dernier kilomètre.

Les fournisseurs de plateformes négligent trop souvent leur intégration dans l’environnement technologique de leurs clients, en les laissant responsables et souvent démunis face aux innombrables caprices que peut faire une technologie presque mature, et presque fiable.

Derrière l’évidente simplicité de Netflix se cache une incroyable complexité, de l’encodage des médias jusqu’à l’ajustement millimétrique de son UX. Là encore, les fournisseurs de plateforme ont largement de quoi s’inspirer en laissant libre cours à leur débordant appétit pour les usines à gaz dans les rouages cachés de leurs outils, mais en étant d’une exigence extrême pour tout ce que perçoit l’utilisateur. Ceux qui doivent passer par 5 étapes (et quelques-fois plus) pour publier un simple document, savent ce que veut dire « lourd et complexe ».

 

Le Netflix des contenus

Si quelqu’un vous demande de rester 60 heures devant votre écran pour regarder un film sur des intrigues politiques, il y a peu de chance que vous acceptiez de bon cœur. Vous trouverez le film « un peu » long, et surtout le sujet pas assez passionnant pour y consacrer tant de temps. C’est pourtant ce qu’on fait tous les fans d’House of Cards. Création originale de Netflix, cette série a su faire durer le plaisir, par des rebondissements, des émotions, des intrigues captivantes. Les créateurs de contenus de formation feraient bien de s’inspirer des principes des séries pour savoir eux aussi maintenir l’attention et l’intérêt des participants en ajoutant une bonne dose de storytelling et un découpage aligné sur le récit plutôt que sur le contenu ne serait pas un luxe, ou l’art de transformer l’ennui en épisodes captivants…

Dans la même veine, si l’envie vous prend de « zapper » un épisode voire une saison entière, rien ne vous l’interdit. Encore un principe que devraient retenir les concepteurs de parcours de formation qui trouvent leur œuvre tellement essentielle qu’il n’est pas possible de la consommer autrement qu’en intégralité.

 

Le Netflix de l’accompagnement

Mais une bonne plateforme et de bons contenus ne font pas tout. S’il n’y avait pas ces petites suggestions fort judicieuses proposées plus ou moins discrètement, qui aurait le courage d’explorer l’énorme catalogue de Netflix ? Personne, tant la tâche est immense. Une grande partie de l’efficacité de Netflix tient au fait que la difficulté de trouver « ce que je vais regarder ce soir » est simple à résoudre, il suffit de faire confiance aux suggestions de Netflix très souvent pertinentes. Cette acuité et cette justesse à proposer des contenus pertinents et intéressants sont une des clés de l’assiduité des spectateurs. La question de l’exploration du catalogue et des mauvais choix n’est plus un frein. Les datas collectées par les plateformes de formations devraient être plus largement exploitées dans la prédiction et la recommandation que dans le reporting et l’évaluation.

Mais proposer n’est pas tout, encore faut-il savoir inciter. Là encore, les informations fournies sur les prochains épisodes, ou les futures saisons, les bandes-annonces, favorisent l’envie de rester encore et encore collé devant l’écran. La question n’est pas de savoir si c’est une bonne chose, mais de le constater : ça marche. La formation à une belle marge de progrès dans son marketing, il est aujourd’hui occasionnel et non systématique.

Une des forces de Netflix est de valoriser et récompenser l’audace de la diversification de ses utilisateurs. Les propositions de programme peuvent parfois surprendre, elles sont cependant presque toujours pertinentes. Elles sont surtout très bien équilibrées entre la diversification des contenus et la satisfaction de conforter les goûts et les choix principaux. La formation devrait elle aussi savoir élargir de façon raisonnée les sujets connexes proposés dans un parcours et ne pas rester cloisonnée sur un sujet unique, pour développer et encourager la curiosité.

 

« Les entreprises meurent rarement parce qu’elles vont trop vite, et elles meurent souvent parce qu’elles vont trop lentement. » — Reed Hastings

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