On se croirait revenu des décennies en arrière ! Car cette croyance, relayée par des pédagogues ignorant les développements scientifiques, est un reste fossile de la théorie des mémoires partielles de la fin du XIXe siècle. Selon cette théorie, proposée par le neurologue Charcot (1825-1893) contemporain de Wagner et Verdi, il existerait une mémoire associée à nos sens, de sorte qu’il y aurait une mémoire visuelle, une mémoire auditive, une mémoire olfactive, etc. Les recherches scientifiques, depuis les années 1960, ont bien révélé des mémoires sensorielles mais elles sont éphémères. La mémoire sensorielle visuelle (maintenant appelée « iconique ») ne dure qu’un ¼ de seconde, la mémoire auditive 2,5 secondes. De plus, du fait de la structure de la rétine, l’acuité est bonne (10/10) seulement dans une petite zone de deux degrés d’angle, qui ne peut voir qu’un visage à cinq mètres ou un mot de 5 lettres dans un livre . Il est donc impossible de visualiser une page entière d’un manuel ou même quelques lignes.
« Comment faites vous Philippe Noiret pour apprendre tous ces textes au théâtre » ?
« Ah…, moi , Monsieur Pivot, je suis un visuel, je photographie les pages de mon texte, et sur scène, je feuillette les pages dans ma tête » !
Je ne jurerai pas que ce sont les propos exacts, car pas plus que de mémoire visuelle, nous n’avons de mémoire auditive ! Mais en effet, si l’on en croit l’idée populaire, les adultes comme les élèves auraient une « mémoire photographique » qui leur permet de « photographier » les pages d’une leçon.