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Blockchain : décryptage TECHNO

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Blockchain : la CONFIANCE mise en ALGORITHME ?

3.
Mon DIPLÔME dans la blockchain ?

4.
Vers des PLACES DE MARCHÉ des COMPÉTENCES

Que faut-il RETENIR à ce stade ?

Imaginez 4 frères vivant dans la même maison. Chacun doit faire la vaisselle à tour de rôle. Joie des négociations sans fin, des alibis pour s’exonérer de la corvée, des petits mensonges et des mémoires défaillantes. Les joutes prennent systématiquement fin par l’arbitrage d’une autorité suprême centralisée : les parents.

Pour mettre fin à toute discussion, le père a une idée : il attribue à chacun des frères une couleur de palet différente. Puis, il construit un long tube transparent indestructible, qu’il fixe dans le sol de la maison pour accueillir ces palets à chaque tour de vaisselle réalisé. Pour éviter de tricher, l’accès au tube n’est possible qu’en présence de la majorité de la fratrie au moins. Un couvercle sur le dessus est fermé par des serrures différentes dont chacun possède une clé unique. Il rappelle alors les 3 règles suivantes :

  • “Vous devez faire chacun votre tour la vaisselle”
  • “À chaque tour de vaisselle que vous réalisez, vous devez vous munir de votre palet et venir le placer en haut du tube”.
  • Chacun de vos frères validera alors que vous avez effectivement réalisé la corvée en ouvrant ensemble le couvercle grâce à leurs clés respectives ; l’ouverture du couvercle fera tomber le palet de couleur à l’intérieur du tube.

La majorité des clés suffit à faire tomber le palet. Ainsi chacun peut-il vérifier, en jetant un oeil au tube, la bonne réalisation des tâches ou savoir à qui incombe la prochaine corvée de vaisselle. Il est impossible de falsifier le tube en essayant de venir récupérer de quelconque manière un palet déjà tombé à l’intérieur. Infalsifiable et indestructible, on pourrait dire que ce tube est en quelque sorte le tube de la vérité, acceptée par le consensus.

Malheureusement ce principe fonctionne si l’honnêteté est de mise dans la maison. Mais si 2 ou 3 frères sont, un jour, de mauvaise foi, le palet ne sera pas validé ! Pour réduire considérablement ce risque nous reproduisons ce tube dans une fratrie de 10 000 frères et soeurs. Ainsi, bloquer cette vérité nécessiterait de corrompre la moitié de la fratrie en même temps, ce qui reste plutôt compliqué.

Cette petite fable familiale, imaginée par le collectif Bam et Blockchain France illustre de façon simplifiée le concept de ce que l’on nous annonce comme la prochaine révolution numérique. Voici donc en substance la philosophie blockchain : confiance et traçabilité désintermédiée.

C’est bien à l’occasion d’une crise de confiance mondialisée qu’est née la blockchain. En 2008, la crise financière bat son plein après un été 2007 placé sous le signe de la crise des subprimes. Les banques centrales et le FMI inondent le marché de liquidités pour éviter l’effondrement du système financier. A ce moment et dans ce contexte particulier de crise de confiance, émerge le Bitcoin, la plus célèbre des crypto-monnaies ayant cours aujourd’hui. Son objectif : s’affranchir des autorités financières pour rétablir la confiance via une unité monétaire totalement dématérialisée et désintermédiée, soumis à la régulation de ces seuls utilisateurs.

Le Bitcoin est ainsi la première application concrète de ce modèle totalement disruptif que l’on appelle la blockchain. Son invention est anonyme. Son créateur (ou ses créateurs, le mystère reste entier) est connu sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto.

Mais le besoin de confiance et de traçabilité reposant sur le consensus des participants n’est pas l’apanage des transactions financières. Tous les secteurs de l’économie sont potentiellement concernés, qu’il s’agisse de la bonne exécution des contrats, de la santé, de l’authentification de diplômes, de la traçabilité de l’acquisition de compétences…

Avant d’envisager comment la blockchain peut redéfinir notre rapport au savoir et à la montée en compétences, quelques préalables techno-philosophiques s’imposent. Ses principes techniques de fonctionnement sont en effet au service d’une relation de confiance 3.0 authentifiée par algorithme.

1.
Blockchain : décryptage TECHNO

D’un point de vue informatique, la blockchain (ou chaîne de blocs en français) est à l’image d’un grand registre numérique d’échanges (financiers ou non) entre une communauté d’utilisateurs.

Ce registre n’est pas tenu par une plateforme centralisée, propriété d’une organisation. Il est partagé sur les serveurs de ses milliers d’utilisateurs. Tout ou partie des utilisateurs est chargée de vérifier l’exactitude et la conformité de toute opération passée, via la résolution d’un problème algorithmique complexe qui garantie l’inviolabilité du système. C’est donc le consensus de tous les utilisateurs qui valide l’opération. Après validation, toutes les opérations concomitantes sont regroupées pour former un bloc. Chaque bloc est lié au bloc précédent, formant une chaîne indestructible ; d’où le nom de blockchain ou blocs de chaîne en français. La traçabilité de chaque opération est totale.

Un schéma de Blockchain France pour résumer le concept :

Une fois la transaction enregistrée, aucun membre du réseau ne peut l’altérer sans altérer la chaîne entière et alerter immédiatement l’ensemble des utilisateurs.

Détails du fonctionnement dans une courte vidéo de Rue 89 :

Pas de blockchain sans tokens

Toute blockchain fonctionne avec des tokens (jetons en français). Ce sont les unités monétaires privées de la blockchain. Le Bitcoin est donc un token ou jeton.

Aujourd’hui le cadre réglementaire de ces jetons reste flou. Des places de marchés dédiées permettent de coter ces monnaies d’un nouveau genre, en continu. C’est ainsi que la volatilité du Bitcoin défraie régulièrement la chronique.

Des levées de jetons sur le même principe que les levées de fonds ont fait leur apparition. Appelées ICO elles permettent à une entreprise d’émettre des jetons (de la monnaie privée) puis de les vendre.

Publique ou privée : la blockchain dans tous ses états

Historiquement, le bitcoin repose sur une blockchain publique, autrement dit accessible à tous. La blockchain publique est donc totalement ouverte et décentralisée. Les utilisateurs conservent l’anonymat. Ils disposent tous, des droits de validation des transactions. Chacun peut visualiser l’ensemble des opérations réalisées. Alternative au Bitcoin, la blockchain publique Ethereum est en passe de s’imposer dans la gestion des « smart contracts ».

Par opposition, il existe désormais un modèle de blockchain privée, totalement fermé et un modèle dit « de consortium » partiellement fermé. Dans ces deux modèles, les utilisateurs ne peuvent pas rester anonymes. Ils sont tenus de déclarer leur identité. En matière de validation, la tâche est réservée :

  • à certains acteurs identifiés pour la blockchain de consortium ;
  • à un acteur unique dans le cadre d’une blockchain privée.

Dans le cadre d’une blockchain privée ou de consortium, les utilisateurs disposent de droits de consultation variables selon les modèles, d’une totale liberté à des restrictions plus ou moins fortes. Le contrôle est donc plus fort sans toutefois altérer les avantages de fiabilité ou de décentralisation.

Les modèles privées et de consortium devraient permettre un développement des technologies blockchain hors des sentiers financiers, que l’on parle de santé, de compétences, de diplômes…

2.
Blockchain : la CONFIANCE mise en ALGORITHME ?

La blockchain constitue donc une technologie de rupture qui présente de multiples avantages :

  • la pérennité des données : la chaîne conserve l’historique et la traçabilité de toutes les modifications intervenues depuis sa création ;
  • l’intégrité et la fiabilité des données : chaque ordinateur du réseau blockchain possède une copie de la chaîne entière qui la rend quasiment inviolable puisqu’il faudrait altérer de façon simultanée plus de la moitié des ordinateurs reliés ;
  • la sécurité : le processus de cryptage très puissant lui procure un niveau de sécurité supérieur à celui de la plupart des opérateurs « tiers de confiance » sur le net et le nombre d’ordinateurs impliqués lui permet de ne pas subir d’interruption de service.

L’ensemble des ces avantages rend le système digne de confiance parce que totalement transparent et décentralisé ; cette confiance recherchée à sa création fin 2008. La réalisation d’opérations via la blockchain étant totalement désintermédiée et sécurisée, elle dispense de recourir à un tiers de confiance (banque, notaire, autorité administrative…). La confiance n’est plus portée par une autorité légitime mais par le consensus des utilisateurs interconnectés.

Ce sont donc de nouveaux rapports de confiance qui se mettent en place. Ils peuvent trouver à s’appliquer dans nombre de secteurs d’activité et notamment dans l’éducation via la certification des diplômes ou dans la formation et le recrutement via la traçabilité des parcours de formation réalisés par un futur collaborateur, par un prestataire, etc.

Un peu moins d’1/4 d’heure de conférence TedX pour comprendre l’ubérisation de la confiance tel que le permet l’essor de la blockchain.

3.
Mon DIPLÔME dans la blockchain ?

Aux termes d’un récent rapport intitulé « Blockchain in Education », la commission européenne qualifie la blockchain de technologie idéale pour sécuriser, partager et vérifier les connaissances et compétences acquises par les individus.

Concernant les certifications, la technologie blockchain peut identifier sur un registre public sécurisé, l’émetteur (organisme certificateur) et le destinataire (l’étudiant ou l’apprenant) de chaque certificat. Le certificat authentifié dans une blockchain devient alors infalsifiable.

Plusieurs instances universitaires ont choisi de certifier leurs diplômes via une technologie blockchain. En France, l’école d’ingénieurs Léonard de Vinci est la première à utiliser la blockchain dans ce cadre. Concrètement, une fois un étudiant diplômé, son diplôme est scanné et intégré dans une plateforme dédiée. La plateforme « hashe » le scan du diplôme : concrètement, ce processus revient à doter ce scan d’une empreinte digitale numérique. Cette empreinte digitale est transférée par la plateforme, pour le compte de l’école, sur la blockchain. L’empreinte numérique de cette opération est tracée et stockée.

Sur la plateforme, l’étudiant va retrouver son diplôme numérisé, l’empreinte digitale numérique de son diplôme et l’empreinte numérique de l’opération enregistrée dans la blockchain. Il pourra ainsi partager son diplôme authentifié avec des recruteurs, des universités ou toute structure sans avoir à solliciter l’école et en assurant l’authenticité du titre qu’il présente. On estime aujourd’hui à plus de 30 % la part de CV « truqués ». On voit alors le potentiel que peut représenter la technologie blockchain en matière de recrutement et le temps gagné en vérifications, devenues alors inutiles.

Le rapport de la Commission européenne met en avant la possibilité pour chaque individu de contrôler ses données, d’en assurer une parfaite transparence sans recouvrir à un tiers de confiance.

En formation continue, la blockchain pourrait ainsi sécuriser le parcours de formation d’un individu en traçant de façon sûre et infalsifiable les compétences acquises.

4.
Vers des PLACES DE MARCHÉ des COMPÉTENCES

Le rapport de la commission européenne assimile les diplômes universitaires à une forme de monnaie sociale pour l’individu et de bien social pour la société. Et le rapport de citer Donald Clark, spécialiste de formation digitale : « La blockchain est une technologie qui peut s’appliquer à l’apprentissage que ce soit au niveau de l’individu, des institutions, de l’État ou même à l’international. Elle s’applique en contexte scolaire, universitaire, dans les MOOC ou en entreprise (…). »

Plusieurs projets actuellement en démarrage visent à créer de véritables places de marché des compétences, basées sur la blockchain.

La société BitDegree propose à des individus de suivre des modules de formation en ligne sur des compétences liées au web. Basée sur la blockchain Ethereum, l’acquisition de connaissances et de compétences est tracée et authentifiée. La validation des modules permet à l’apprenant d’obtenir des récompenses en jetons Bitdegree, la crypto-monnaie privée de la plateforme. Quand les badges de la Khan Academy se monétarisent…

Ces jetons peuvent être utilisés comme bourse d’étude par l’apprenant qui peut ainsi suivre d’autres modules et poursuivre sa montée en compétences. Son parcours de formation est ainsi tracé et certifié de façon pérenne.

A côté des apprenants, la société recrute des sponsors. Ces sponsors sont invités à acquérir des jetons Bitdegree qui leur permettront de recruter les meilleurs profils. Entendez les apprenants ayant suivi les modules de formation proposés par la plateforme et au terme desquels leurs compétences acquises auront été authentifiées et valorisées via blockchain.

Les jetons pourront également être échangés entre utilisateurs de la plateforme ou contre des biens ou services numériques et devraient être acceptés dans un réseau de partenaires de la société. L’ICO (la levée de jetons) est programmée du 1er au 31 décembre 2017.

Que faut-il RETENIR à ce stade ?

La blockchain constitue aujourd’hui une technologie émergente qui étend ses applications hors de la sphère financière un peu plus chaque jour. L’éducation et la formation constituent des secteurs encore peu investis par cette nouvelle technologie. Le potentiel du secteur dans un contexte d’économie de la connaissance est immense.

La blockchain entend désintermédier la confiance en redonnant à son réseau d’utilisateurs un pouvoir de contrôle jusqu’alors réservé à des autorités centralisées.

Un changement de paradigme qui pourrait bien ubériser Uber !